Le long de la frontière de 200 km entre la Grèce et la Turquie, au bord du fleuve Evros, les policiers grecs déploient désormais un arsenal de drones, de caméras et de nouvelles technologies pour empêcher des flux de migrants de pénétrer dans le pays. Le ministre grec des migrations Notis Mitarachi défend cet équipement high tech. L’Union européenne se dit « préoccupée ».
La Grèce ne lésine pas pour protéger ses frontières. Athènes a récemment acquis un arsenal ultra-technologique pour empêcher les migrants d’entrer illégalement sur son sol depuis la Turquie voisine le long du fleuve Evros, sa frontière naturelle. Sur cette frontière longue de quelque 200 km, les policiers grecs déploient désormais des drones, des caméras, des capteurs thermiques et des canons sonores.
« L’objectif est d’être alertés tôt, avant que [les migrants] ne touchent la frontière », a expliqué l’officier de police Dimosthenis Kamargios à l’AFP. L’équipement technologique a été installé le long du nouveau mur métallique de plus de 5 m de haut, construit en octobre 2020, pour renforcer la frontière gréco-turque. Des caméras et radars high-tech ont été accrochés sur les pylônes, balayant la zone « pour empêcher l’entrée illégale de migrants », rapporte l’officier de police Dimosthenis Kamargios.
« Caméras thermiques »
« Pour obtenir une image précise en temps réel, toute la longueur de la frontière, du delta de l’Evros à la frontière gréco-bulgare, sera couverte par des capteurs et des caméras thermiques », ajoute le policier au centre régional de gestion des frontières et de l’immigration.
La police grecque a acheté ce matériel ultra-moderne après l’afflux de migrants survenu en février 2020 lorsque le président turc Recep Tayyip Erdogan avait annoncé qu’il laisserait passer les migrants désireux de se rendre dans l’Union européenne.
Des « canons sonores »
La police a même acquis deux canons sonores, positionnés au sud et au nord de l’Evros. Ce matériel ultra-moderne peut émettre un son allant jusqu’à 162 décibels, alors qu’une conversation normale est en moyenne de 60 décibels et qu’un jet émet environ 120 décibels. « L’objectif est de pouvoir répondre aux menaces […] au cas où nous serions face à une tentative d’incursion massive sur le territoire grec », explique encore le policier Dimosthenis Kamargios.
Le canon sonore « n’a pas encore été utilisé », assure Dimosthenis Kamargios. « C’est un appareil acoustique à longue portée, et pas un canon. Il reproduit le son de la sirène à un volume élevé afin d’empêcher l’entrée illégale d’immigrants », tient à préciser l’officier.
Frilosité de l’UE
La semaine dernière, la Commission européenne s’est dite « préoccupée » par l’usage d’un tel dispositif. Un porte-parole de la Commission, Adalbert Jahnz, a indiqué être « en contact avec les autorités grecques » pour discuter de cet arsenal.
Pour autant, l’Union européenne ne sévit pas. Elle s’étonne : « Je pense que c’est une façon étrange de protéger vos frontières », a simplement déclaré la commissaire aux Affaires intérieures Ylva Johansson, lors d’une conférence de presse à Bruxelles à l’issue d’une rencontre avec le ministre grec des migrations Notis Mitarachi.
Au cours des trois dernières semaines, la police grecque a arrêté plus de 170 migrants clandestins ainsi que 40 trafiquants. Selon la police, les passeurs font souvent appel à des mineurs pour transporter les migrants car, en cas d’arrestation, les sanctions sont moins lourdes.
Reprise des passages
« Ces derniers jours, en raison du bas niveau du fleuve et de la levée du confinement strict en Turquie, nous avons constaté que les réseaux opérant dans le pays voisin ont été réactivés et les passages ont augmenté », a déclaré le président des garde-frontières d’Evros, Valantis Gialamas.
Les agriculteurs également disent apercevoir régulièrement des migrants traversant la frontière. « J’ai le terrain juste à côté du fleuve, près du point où la palissade se termine à Kastanies. Presque tous les jours, je vois des petits groupes traverser. Cette situation ne va pas s’arrêter », estime Tasos, 55 ans, qui vit dans le village de Nea Vyssa.
Avec infomigrants