Un coup d’Etat ou un coup de libération, chacun y va de son commentaire.
L’interprétation de l’événement du 05 Septembre est actuellement le sujet qui occupe tous les esprits en Guinée. Il faut noter clairement que l’événement du 05 Septembredernier n’a aucune autre appellation que coup d’Etat. La question est de savoir qu’est-ce qui est à la base de ce coup d’Etat? Comment est-il perçu aux yeux de l’opinion? Qu’est-ce qu’il faut pour réussir la transition ? La réponse à ces interrogations réside sur la réaction des citoyens face aux évènements passés.
Il faut rappeler que le Dimanche 22 Mars 2020, la Guinée était le théâtre d’une violence inouïe. Malgré l’énergique résistance et l’opposition catégorique d’une bonne partie de la population, le régime de Alpha Condé a imposé au peuple de Guinée dans une totale obstination, le coup d’Etat constitutionnel. Cet état de fait a permis à la candidature de l’ex-président de s’offrir une prétendue légalité qui malheureusement l’a systématiquement éloigné de la légitimité. Pourtant, la légitimité est une condition sine qua non pour asseoir une autorité. Ceci dit, une autorité peut manquer de légalité puis subsister mais dès qu’elle perd sa légitimité, elle s’écroule. Donc, les événements actuels sont nourris et entretenus par les événements antérieurs. Par ailleurs, le déferlement humain dans les rues du pays exprime très clairement l’indéfectible soutien de la population au coup d’Etat.
Cependant, il est important de souligner en filigrane, cette liesse ne signifie nullement l’amour de la population à l’égard de l’armée ou l’allégresse de revenir à un pouvoir militaire, plutôt la joie de se voir débarrasser d’une bosse qui l’empêchait de se tenir debout.
C’est pourquoi, cette nouvelle autorité doit être suffisamment intelligente pour traiter les choses avecbeaucoup de prudence puis agir avec lucidité. Comme le dit cette sagesse populaire, les mêmes chemins conduisent toujours aux mêmes destinations. Alors, pour avoir ce que tu n’as jamais eu, il faut faire ce que tu n’as jamais fait. Au Colonel Doumbouya et son équipe, pour obtenir un résultat reluisant et différent de ceux de vos prédécesseurs, agissez différemment qu’eux dans le sens positif.
Les actions à poser pour la réussite de la transition !
La réussite de la transition commence à priori par l’élaboration d’une charte à la fois réaliste et réalisable. Cette charte ne doit subir ni l’influence internationale, ni l’influence des acteurs sociaux encore moins celle des acteurs politiques. Elle doit absolument tenir compte de la dimension des enjeux, l’immensité du travail à accomplir.
La mise en place d’un gouvernement de transition, le futur gouvernement est un élément important pour la bonne conduite de la transition. Des critères très sélectifs axés sur le parcours mais aussi et surtout surla probité morale doivent être posés sur la table. A commencer par le Premier ministre chef de gouvernement, il doit être un acteur aux compétences avérées, consensuel, de préférence, qui n’a pas fait figure politique par le passé.
Il faut éviter l’erreur de reconduire les anciens dignitaires du régime déchu pour quelque raison que ce soit. Ils sont perçus par l’opinion soit comme acteurs ou complices du malheur guinéen. Leur présence dans le gouvernement réconforte la conviction des sceptiques qui croient jusqu’à présentà un simulacre de coup d’Etat puis nourrit davantage les spéculations. Egalement, Il faut éviter la pléthore du gouvernement, cela nous conduirait aux dépenses improductives.
La mise en place du Conseil National de la Transition (CNT) doit impliquer toutes les entités sociales. De ce point de vue, aucune entité ne doit être privilégiée à l’autre. Seulement, pour éviter au pays des dépenses faramineuses, il faut limiter autant que possible le nombre de conseillers. De préférence, ce nombre doit être inférieur au nombre des députés ordinaires de l’assemblée.
Dans l’esprit de rendre cet organe transversal et inclusif, sa composition doit obéir à un certain nombre de spécificité et d’architecture.
Ces différents représentants seront choisis comme suit:
Chaque sous-préfecture ou quartier doit envoyer une ou un représentant au niveau préfectoral ou communal.
Mettre en place une commission d’enregistrement des délégués de sous-préfectures ou quartiers tout en étant stricts sur les critères d’éligibilité.
Après la section des délégués de sous-préfectures oude quartiers, ceux-ci vont élire la ou le représentant de leur préfecture ou commune.
Ces représentants seront choisis comme suit : Pour cela, il faut mettre en place une commission d’enregistrement des ONG et Associations dans chaque région administrative tout en établissant des critères d’éligibilité très sélectifs. Après la sélection des ONG et Associations enregistrées, il faut élire deux 2 représentants des organisations dans chaque région administrative.
Ces représentants seront choisis comme suit : Il faut mettre en place une commission indépendante et crédible qui va enregistrer les partis politiques qui manifestent leur intérêt. Après l’enregistrement des partis politiques, les partis retenus vont élire les 16 représentants. NB: pas plus qu’un représentant par partis politiques.
Mettre en place une commission indépendante et crédible qui va enregistrer les organisations qui manifestent leur intérêt au processus. Après l’enregistrement des organisations, les organisations retenues vont élire les 6 représentants. Pas plus qu’un représentant par pays. NB: chaque représentant de ces organisations doit impérativement résider en Guinée durant toute la durée de la transition.
Avant la prise de fonction, ces 94 conseillers doivent prêter serment de travailler uniquement pour l’intérêt supérieur de la nation.
Quant à l’éventuelle constitution, il faut impérativement la soumettre au référendum pour éviter les dérives de la transition de 2010.
L’organisation de toutes les élections surtout, les trois élections majeures par le gouvernement de transition nous évitera les inconforts du passé et permettra à celui ou celle qui sera élu (e) de faire face aux problèmes économiques durant sa première mandature. C’est un aussi un moyen de nous éviter d’avoir un président hyper fort qui prendra l’assemblée et les mairies en otage. C’est pourquoi, il faut faire beaucoup attention aux appétits aiguisés de certains acteurs politiques ou bien, la double face de certains acteurs sociaux.
Pour cela donc, il faut doter le pays dès l’instant des institutions crédibles et fortes qui seront capables dejouer un rôle crucial pour la réussite de ce processus.
Le choix des acteurs qui doivent meublés ces institutions ne doit pas faire l’objet du copinage comme ce fut toujours le cas. Des critères objectifs et sélectifs doivent être mis sur la table. Il faut s’intéresser au passé des acteurs qui vont occuper nos institutions. Il faut nous éviter de voir des anciens criminels ou délinquants et leurs complices à la tête de nos institutions. Une fois ce pari est gagné, les comportements obscènes vont baisser leur envergure.
Il faut que ce nouvel air qui commence à souffler puisse orienter notre pays vers une nouvelle direction. J’avoue que cela est bien possible, si etseulement si cette autorité reste conséquente et intransigeante sur les questions d’intérêt national.
Ainsi soit-il !
Boubacar Pelly BAH
Politologue, Activiste et Professeur de philosophie
bahboubacarpelly@gmail.com