Organiser un concert ou un spectacle grand public devient de plus en plus préoccupant à Conakry. Surtout quand il s’agit de la musique urbaine (rap, dacehall, reggae etc). L’on a impression que certains spectateurs ont pour mission de saboter ces évènements qui rassemble des milliers de jeunes. En bande organisée et à une ils tentent par tous les moyens pour nuire à la bonne marche des spectacles. Je rappelle les faits les plus récents.
Le dimanche 27 février 2022 sur l’esplanade du palais du peuple, la structure Benedi Records réunissait sur une même scène, quelques têtes d’affiche de la nouvelle génération du rap guinéen à savoir Saouro, Dépotoir, Wada du Game, Gnamakallah, Straiker, Maxim BK et MC Fresh (ndrl: ce fut l’ordre de passage des artistes). Et le dimanche 6 mars dernier, Wak Boss Music organisait le concert du nouvel album « Surnaturel » du chanteur et danseur Ans T Crazy sur l’esplanade du stade de nongo.
Ces deux évènements ont réuni chacun plus de dix mille spectateurs. Ce qui démontre une fois de plus, la place qu’occupe la musique urbaine dans le paysage musical. Les dimanches se suivent et se ressemblent. Les organisateurs ont utilisé la même scène et presque la même logistique son et lumière. Trois des présentateurs du premier concert étaient présents sur le deuxième. Je vais nommer Mimiche Diabaté de Cis Médias, Fresh DD de FIM FM et DJ Lako d’Evasion Guinée.
Aux environs de 22h, c’est l’heure bien indiquée pour certains spectateurs mal intentionnés et autres inconscients pour démarrer leur sale besogne. Jeter des sachets et bouteilles d’eau, des bouteilles d’alcool et autres pierres sur les artistes et présentateurs. Pour le cas de l’esplanade du palais, chaque groupe ou artiste avait droit à vingt minutes de prestation. Le groupe Gnamakallah a été copieusement bombardé d’eau et autres objets presque tout au long de leur show après les prestations des trois premiers cités. Malgré le boycott, le groupe a fait son show. L’intervention de l’organisateur n’a pas calmé ces spectateurs. De passage, il faut juste noter que cette attitude déplorable a débuté dès après la prestation du rappeur Wada du Game qui, a fait la plus belle prestation de la soirée. Straiker, la révélation aux dernières victoires de la victoire de la misique guinéenne a aussi payé les frais. Pour la première fois, je suis monté sur la scène d’un concert pour m’adresser au public pour essayer de raisonner les spectateurs surchauffer. Le message est passé et l’un des finalistes du prix découverte Rfi, Maxim BK s’est produit sans être inquiété.
Pour boucler ce concert inédit et sous fond de rivalité avec le rappeur MC Fresh qui était sans doute le plus attendu, alors c’était mal connaitre les réelles intentions de ces fouteurs de troubles. Visiblement, ils attendaient de pieds fermes le rappeur. Depuis sa loge, MC Fresh était déjà préparé à tous les scénarios. Dès sa montée sur scène, ses fans étaient très contents et ses détracteurs furieux. Et bim! Les jets d’eau ont commencé à arroser la scène, l’artiste et les techniciens sur la scène. Même des bouteilles d’alcool ont éclatés sur la scène. Certains visaient même les hauteurs et lumière avec des sachets d’eau. Quelle échanceté !
Après une dizaine de minutes de prestation, les organisateurs ont fait le choix de s’assurer la sécurité du rappeur et mettre fin à sa prestation. Une décision responsable. Je me demande: qui en veut à ce point à MC Fresh?
Et le dimanche dernier lors du concert d’Ans T Crazy sur l’esplanade du stade de nongo, le même scénario et jets d’eau ont repris. Mais cette fois-ci, les choses sont allées plus loin. L’un des présentateurs, DJ Lako a été touché à la tête par une pierre. Ces mauvais comportements deviennent fréquent et nuisent gravement à la bonne marche des manifestations artistiques. Les conséquences de ces actes sont néfastes pour les entreprises de sonorisation et lumière qui voient leurs matériels endommagés et met en danger l’intégrité physique de toutes les parties prenantes (organisateurs, techniciens, chanteurs, agents de sécurité, invités, présentateurs et spectateurs).
Les organisateurs de spectacles ont aussi une grande part de responsabilité dans ce grand désordre (j’y reviendrai pour plus de détails). Il est grand temps que les autorités compétentes et organisateurs de spectacles se retrouvent pour se pencher sur la question et prendre de nouvelles dispositions afin de garantir la bonne tenue de ces évènements.
Par la même occasion, j’invite les conseillers du Conseil National de la Transition (CNT) à s’intéresser à cette situation qui risque de plomber un secteur déja en difficulté. Il faut aussi mener des campagnes d’informations et de sensibilisation en faveur des organisateurs des spectacles et du grand public. Un lieu de spectacle n’est pas une scène de violences. Trouver aussi des voies et moyens pour identifier les coupables, les arrêter et les punir selon la loi.
À ce stade, il serait important de refléchir et définir les horaires de démarrage et de fermeture des spectacles. Pourrait-on aussi envisager l’interdiction de la vente des boissons et leur accès dans l’enceinte de ces lieux de spectacles?
Wait and see !
Crédit photo: Habib Safico
Par Aly Bongo Léno