Tunis (dpa) – Alors que la faim menace des dizaines de millions de personnes en Afrique, ce continent affiche des niveaux de pertes post-récolte parmi les plus élevés au monde. Selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), les pertes post-récolte font référence à la quantité et à la qualité de nourriture perdue – comme avec, par exemple, les céréales, les fruits, les légumes, la viande, les poissons et le lait – entre la ferme et le point de vente avant l’étape de la consommation.
En Afrique subsaharienne, les pertes annuelles de nourriture s’élèvent à 4 milliards de dollars, estime la FAO qui déplore que la nourriture qui « disparaît » de la chaîne alimentaire après-récolte, en raison du phénomène de décomposition, pourrait nourrir près de 48 millions de personnes dans la région. À cause de l’impact de la Covid-19, de la sécheresse et de l’insécurité, près de 36 millions de personnes devraient souffrir de la faim, entre juin et août 2022, en Afrique de l’Ouest et du Centre, « si des mesures rapides ne sont pas prises », avertissent la FAO et le Programme alimentaire mondial (PAM), deux agences onusiennes spécialisées.
La majeure partie des pertes alimentaires, en Afrique, se manifeste entre l’étape de la récolte et le point de vente. Très peu de nourriture est, en fait, gaspillé par les consommateurs après achat, a-t-on précisé. À en croire des études commandées par la FAO avant la pandémie Covid-19, les pertes post-récolte de fruits et de légumes dans les exploitations agricoles, en Afrique subsaharienne, atteignent 50 pour cent, « soit le taux le plus élevé au monde ». D’après ces études, les pertes d’après récolte dans les fermes subsahariennes peuvent atteindre jusqu’à 20 pour cent pour les céréales et les légumineuses (taux le plus élevé aussi dans le monde), et 30 pour cent pour les produits laitiers et le poisson.
Causes et effets
Le manque d’équipements de la chaîne du froid, en particulier pour les denrées périssables, les installations de stockage peu fiables et inadéquates, et l’insuffisance des compétences dans les communautés de petits agriculteurs en matière de transformation des produits agricoles, sont cités parmi les principales causes de perte de nourriture en Afrique. En effet, lorsque la nourriture est perdue ou gaspillée, toutes les ressources qui ont servi à la produire, c’est-à-dire l’eau, la terre, l’énergie, le travail et le capital, sont gaspillées, relève la FAO.
En outre, la décomposition des récoltes (fruits, légumes,…) dans les champs est responsable de l’émission de dioxyde de carbone (CO2), le gaz à effet de serre responsable du réchauffement climatique planétaire. En privant le marché d’une partie de l’approvisionnement, ces pertes post-récolte entraînent une hausse des prix des denrées alimentaires. En 2014, les pays membres de l’Union africaine (UA) se sont fixés l’objectif ambitieux de réduire de moitié les pertes après-récolte d’ici 2025. Mais peu de progrès ont été enregistrés. C’est pourquoi l’Organisation des Nations Unies (ONU) a lancé un appel à l’action envers les pays africains pour redoubler leurs efforts et d’encourager les investissements du secteur privé pour réduire les pertes et le gaspillage de nourriture.
Cet appel a été lancé lors de la toute première « Journée internationale de sensibilisation aux pertes et gaspillages de nourriture » instaurée le 29 septembre 2020. Réduire de moitié les pertes post-récolte, en Afrique, sont une responsabilité que doivent partager les gouvernements, le secteur privé, la société civile, les agences de développement, les institutions de recherche et les universitaires, ainsi que les consommateurs, souligne la FAO.