L’ancien Premier ministre de Alpha Condé, le Dr Ibrahima Kassory Fofana, est invité à comparaître devant la chambre de contrôle de la Cour de répression des infractions économiques et financières (Crief) jeudi ou vendredi prochain pour faire examiner l’ordonnance rendue par la chambre d’instruction le 19 mai 2022.
À cette audience de première comparution, la chambre d’instruction a inculpé Ibrahima Kassory Fofana et ses deux compagnons – Mohamed Diané, ancien ministre de la Défense nationale, et Oyé Lamah Guilavogui, ancien ministre de l’Environnement, des Eaux et Forêts – et décidé de les placer en liberté sous condition.
Rappelons que Ibrahima Kassory Fofana est en détention à la maison centrale de Coronthie depuis le 6 avril 2022 pour des griefs imprécis, vaguement énumérés dans le réquisitoire du procureur spécial près la Crief, Aly Touré.
Jeudi 19 mai, le collège des juges d’instruction de cette juridiction a écarté les réquisitions du procureur spécial et décidé, au lieu du placement sous mandat de dépôt, d’une mise en liberté et d’un placement sous contrôle judiciaire assortis de conditions, notamment le paiement d’une caution – comme ce fut le cas avec l’ancien ministre des Hydrocarbures Diakaria Koulibaly. Les juges ont opposé un refus à la demande de maintien en détention formulée par le procureur spécial.
Ainsi, selon les conseils, Ibrahima Kassory Fofana devait être libéré immédiatement, ainsi que ses deux codétenus.
C’était compter sans la hargne et l’entêtement du procureur spécial. Mû par ses idées fixes, il a fait appel de la décision et les avocats, à leur tour, ont fait un appel incident relativement au quantum élevé des montants des cautions.
Ibrahima Kassory Fofana et les deux autres ont donc été reconduits en prison, en violation grave de la décision unanime des juges d’instruction. Or, le premier mandat de dépôt décerné par le procureur spécial alléguait le flagrant délit. Cette prétention a été facilement ruinée par les ripostes juridiques des conseils de Ibrahima Kassory Fofana et de ses deux codétenus. Malgré tout, le procureur spécial Aly Touré a passé outre et a mis ceux-ci en détention, arbitrairement et illégalement.
Il a réitéré ses violations des procédures pénales et de la loi le jeudi 19 mai 2022, en maintenant en détention l’ancien Premier ministre et ses deux anciens ministres, contre la décision unanime du collège des juges d’instruction. Il y a comme une volonté arrêtée de sa part d’aller à l’encontre des juges de la Crief, qui ont pourtant le dernier mot sur l’affaire, et de maintenir les prévenus en prison envers et contre tous.
Les motivations et l’obstination du procureur spécial Aly Touré sont aussi obscures que son incompétence est notoire, de l’avis de juristes qui suivent de près l’affaire.
Curieusement, il se dérobe par ses absences injustifiées aux audiences quand les parties sont invitées à comparaître à la Crief. Selon toute vraisemblance, il appréhende les débats directs avec les grosses pointures des barreaux guinéen, malien et parisien qui assurent la défense, parmi lesquelles figure maître Mamadou Ismaïla Konaté, un ancien ministre de la Justice malien.
À la prochaine audience, prévue pour les touts prochains jours, les juges de la Crief reverront-ils à la baisse les cautions libératoires fixées et accorderont-ils enfin la liberté conditionnelle aux mis mis en cause Ibrahima Kassory Fofana, Mohamed Diané et Oyé Lamah Guilavogui ? C’est le défi lancé par le procureur spécial Aly Touré à la fois à ces juges mais aussi à la loi guinéenne.
Force doit rester à la loi. Du moins, on s’en assurera sous peu.
Pierre Zola