Plus de 200 exilés ont été expulsés, tôt dans la matinée de mercredi, de leur camp informel dans le nord de la Serbie, à la frontière hongroise. Une partie d’entre eux a été transférée dans des centres d’accueil du pays, d’autres ont été présentés à un procureur. De nombreux migrants empruntant la route des Balkans passent désormais par la Serbie, pour gagner l’Union européenne.
Ils voulaient rallier l’Union européenne par la Hongrie. Deux-cents personnes ont finalement été interceptées par la police serbe tôt dans la matinée du mercredi 5 octobre, alors qu’elles prévoyaient de traverser la frontière, a annoncé le ministère de l’Intérieur du pays. « Un certain nombre de migrants ont été escortés par la police jusqu’au centre d’accueil pour migrants, et d’autres ont été conduits au bureau du procureur compétent », indique le ministre de l’Intérieur Aleksandar Vulin, cité dans un communiqué.
Une quantité non précisée d’argent et d’armes a été retrouvée lors de ce raid mené dans le nord, près de la ville de Srpski Krstur, le long de la rivière Tisa.
Une vidéo de l’opération, diffusée sur le site du ministère de l’Intérieur, montre les forces de l’ordre en plein travail. Les migrants, mains derrière la nuque, sont expulsés les uns derrière les autres de leur petit camp informel situé dans les bois. Dans un second temps, des agents en tenue militaire fouillent dans les tentes et les vident des affaires des exilés. On aperçoit par exemple un homme fouiller une petite banane de cuir et y récupérer les billets en euros qui y étaient rangés. La police confisque aussi des téléphones.
« Notre pays (…) ne sera pas un parking pour les migrants », et « la Serbie n’est pas et ne sera jamais un endroit pour les criminels et les racailles qui font du trafic d’êtres humains et gagnent de l’argent grâce à leur douleur et à leurs souffrances », a averti Aleksandar Vulin.
Le 14 juillet, une autre opération policière menée à Subotica, dans le nord du pays, s’était conclue par l’arrestation de 85 personnes. De nombreuses armes avaient là aussi été retrouvées, d’après les autorités. Ce raid faisait suite à un affrontement majeur entre plusieurs groupes de migrants, le 2 juillet. Selon des médias, la fusillade avait opposé des migrants afghans et pakistanais, vraisemblablement à propos du trafic auquel se livrent les passeurs pour faire franchir la frontière aux exilés vers la Hongrie, pays membre de l’Union européenne.
La Serbie plutôt que la Bosnie
La Serbie, pays européen non membre de l’UE, est devenu un point de passage important pour les migrants qui empruntent la route des Balkans. Parmi les raisons qui expliquent l’augmentation des arrivées dans le pays cette année : le régime de visas appliqué par Belgrade, qui exempte certaines nationalités du précieux sésame, à l’instar des ressortissants indiens, nombreux parmi les exilés.
Lundi 3 octobre, à l’issue d’une réunion avec les dirigeants autrichien et hongrois, le président Aleksandar Vulin s’est donc engagé à aligner sa politique des visas sur celle de l’UE d’ici la fin de l’année. « Cela empêchera que la Serbie serve de voie de migration illégale vers l’Ouest « , a-t-il déclaré. Les migrants qui passent par la Serbie se dirigent ensuite vers la Hongrie, puis vers l’Autriche, des pays qui constatent eux aussi une augmentation des demandeurs d’asile cette année.
Bien que fermée en 2015, la route des Balkans n’a jamais vraiment cessé d’être empruntée par les exilés cherchant à gagner l’UE. D’après l’Organisation internationale des migrations (OIM), 96 988 personnes ont emprunté ce passage jusqu’ici cette année. Pour toute l’année 2021, 102 00 arrivées avaient été décomptées. Mais alors que la Bosnie était « le point de passage privilégié des migrants en 2018 et 2019 », depuis l’année dernière, la Serbie a pris le relais, et « accueille bien plus d’exilés sur son sol », affirme Laura Lungarotti, coordinatrice de l’OIM pour les Balkans occidentaux, jointe par Infomigrants.
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Pour faire face à l’augmentation des arrivées, Belgrade s’est aussi doté ces derniers mois de trois nouveaux centres d’accueil. Au total, 19 structures dédiées sont éparpillées un peu partout dans le pays, d’une capacité de 7 968 places, indique encore Laura Lungarotti. Mais le système d’accueil est malgré tout, saturé. Des milliers d’autres exilés syriens, afghans, pakistanais, burundais et marocains errent dans des camps informels ou dans des petits villages abandonnés, situés pour la plupart dans le nord du pays.
Plus de surveillance aux frontières tchèques, autrichiennes, hongroises…
Dans les pays voisins, destinations des migrants, la situation en Serbie inquiète. En réaction, la Hongrie, l’Autriche, la Slovaquie et la Slovénie se barricadent.
Mercredi, le gouvernement tchèque a annoncé prolonger les contrôles à sa frontière avec la Slovaquie pour 20 jours supplémentaires. Les patrouilles de police avaient repris le 29 septembre dernier, dans cette zone étendue sur 252 kilomètres, initialement pour dix jours. Vingt-sept points d’entrée – routiers et ferroviaires – ainsi que des chemins le long de la frontière, sont actuellement surveillés par 500 agents des forces de l’ordre. Avant la mise en place des contrôles, Prague a vu l’arrivée sur son territoire d’environ 12 000 migrants en 2022, soit 12 fois plus qu’il y a un an.
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La semaine dernière, l’Autriche a pris des mesures similaires, en renforçant ses contrôles à l’Est, à la frontière slovaque, et à l’Ouest côté suisse. Quelques jours avant, le ministre hongrois de l’Intérieur, Sandor Pinter, avait, lui, indiqué que la Hongrie prévoyait de déployer 4 000 soldats frontaliers au sud du pays.
« La fermeture des frontières ne sera jamais une solution aux défis migratoires, déplore Laura Lungarotti. Ce qu’il faut, c’est une gouvernance solide et adaptée à ces questions. Les mesures d’urgence ne résoudront rien, car il y aura toujours de la migration dans cette zone. Qu’on le veuille ou non ».