Mme Camara Kadiatou Diallo, « Kadija Diallo pour les intimes » un exemple qui inspire !
Des huppés salons de manicures, de pédicures et autres soins du visage destinés à égayer des téléspectateurs à travers des somptueux plateaux de télévision à …une inédite femme rurale barbotant toujours dans les rigoles boueuses ou arpentant souvent, à motos des sentiers glissants, etc., le raccourci pris par Mme Kadiatou Diallo est saisissant. En cause : son amour subite pour l’agriculture dans le but de faire partie des pionniers de l’autonomie de la femme rurale, voire de l’autosuffisance alimentaire en Guinée, est manifestement un exemple qui inspire.
Dans l’extrême nord-ouest de la Guinée, entre le Sénégal et la Guinée Bissau, sur les pittoresques berges du fleuve Koliba ou Komba, parmi les Peuls, les Badiarankés, les Bassaris, les Koniagui, Foulakounda, etc., à quelque 400 kilomètres de Conakry, la ville historique, mais fantôme de Koundara (Région de Boké), bienvenue dans le Badiar ! C’est ici, dans cette bourgade de Sareboido, perdue à quelques encablures du centre-ville où sont cultivés du riz et du maïs. Au total, 140 hectares en riz et 20 hectares de maïs.
C’est l’œuvre de Mme Camara Diallo, celle qui a rangé son micro et ta table de présentation des journaux télévisés pour se reconvertir en agriculteur ou pour dire tout net, en femme rurale. Elle a réussi à s’adapter. D’abord à travers la variété locale du riz appelée Lapara, ensuite, l’expérimentation d’autres variétés telles que CK43 et CK 450. Ces variétés sont caractérisées par leur rapide maturité. La journaiste-agriculteur a su aussi, à travers son appui à quatre groupements de paysans (semences, équipements de labour, outils agricoles, etc.), à se faire adopter. Et c’est pour justement revoir ces champs de maïs et de riz qu’un safari des plus chaotiques, eu égard à l’état de la route entre Boké et Koundara a été réalisé. Même en voiture 4×4, le risque est multiple.
Les zones de production sont quasi inaccessibles. Les deux-roues sont donc adaptés à certains endroits. A d’autres, la randonnée pédestre est plus fiable. Même si les reptiles et autres bêtes restent à craindre. L’option a en tout cas été bien servie, en ce week-end ensoleillé de fin septembre 2022.
Cinq motos se suivent, sur des sentiers où boues latéritiques, flaques d’eaux à perte de vue meublent le parcours. Chacun des motards avec un passager. Parmi ceux-ci, Mme Camara Kadiatou Diallo, frileuse au départ, mais, avec les assurances des uns et des autres, elle a fini par embarquer à bord, bien crochée au conducteur. Pantalon jean délavé, basquettes, en lieu et place des bottes adaptées, le tout assorti par un foulard et souvent une casquette, Mme Camara Kadiatou Diallo, cette mère de deux enfants n’est apparemment pas ce genre de femme happée par la facilité. Elle se lance des défis d’homme et tente de les relever presque toute seule. Avec des moyens du bord.
La fille de Mombéya (Dalaba), sous les replis des contreforts du Fouta Djallon sait bien qu’elle vient de loin. Et elle veut aller très loin dans son rêve de femme rurale pleine d’énergie qui a désormais fait de la terre, une alliée incontournable. Pour réussir son pari, elle ficelle aussi une relation, à la fois familiale que professionnelle avec des organisations paysannes locales. Ces hommes et femmes sont donc devenus des éclaireurs. D’ailleurs, un des porte-paroles de ces groupements paysans lance un appel pressant à l’endroit de toutes les bonnes volontés afin de les accompagner à la prochaine saison. Il s’agit d’engrais, d’équipements agricoles, mais surtout de techniciens dans le domaine. De quoi leur permettre de mieux jouer sur le calendrier des aléas de saisons.
Même ambiance à Kolaboui, dans Boké. Ici aussi, 50 hectares de maïs sont aménagés. Les semences poussent de la façon la plus souhaitée. Un motif de satisfaction pour Kadija Diallo : « L’année prochaine, je compte, avec les différents appuis des partenaires et autres pouvoirs publics, améliorer les techniques culturales en vue d’accroitre le rendement. C’est un travail absolument alléchant bien qui requiert un accompagnement accru », indique-t-elle, le regard jeté sur la vaste étendue de culture.
Avec cet engagement, presque à mains nues, sans appuis, sans engrais, ni même des techniques culturales, Mme Kadiatou Diallo n’entend pas pour autant s’arrêter en si bon chemin. Elle nourrit l’espoir de se voir grandir avec ses groupements paysans avec
qui elle a déjà suffisamment d’audience.
Un excellent choix pour aboutir à
l’autosuffisance alimentaire ou en tout cas à l’autonomisation des femmes rurales. La lutte contre la pauvreté passe aussi par-là, pourrait-on dire. C’est donc et après tout, un exemple qui inspire, au moment même où l’humanité célèbre la journée de la femme rurale.
Par : Thierno Fode.