Le centre de santé sexuelle, situé dans un hôpital parisien, propose des consultations de dépistages de la chlamydia et du gonocoque, de la syphilis, des hépatites B et C et du VIH, ainsi qu’un suivi médical. Le service est gratuit et ouvert à tous, y compris aux migrants sans-papiers qui ne sont pas enregistrés à la Sécurité sociale française.
Herman, 27 ans, vient tout juste de faire sa prise de sang dans une salle du centre de santé sexuelle, situé au 6e étage de l’hôtel Dieu, un hôpital du centre de Paris. Il recevra les résultats dans une semaine.
« Ma nouvelle petite amie m’a demandé de faire le test du VIH [Sida] », raconte ce jeune guinéen en France depuis 3 ans. « Elle a perdu sa mère très jeune, et il y a quelques temps elle a appris que sa maman était morte du Sida. Elle aussi a fait le test il y a un mois et c’était négatif. Maintenant c’est à mon tour. Aucune de mes anciennes petites amies n’ont été malades à ma connaissance, mais je préfère vérifier ».
Dans ce centre de santé, qui dépend de la Ville de Paris et de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris (APHP), les dépistages des infections sexuellement transmissibles (IST) sont gratuits et anonymes. « Notre accueil est inconditionnel », explique le Dr Florence, co-responsable du lieu. En d’autres termes, ici, pas besoin d’être enregistré à la Sécurité sociale française. Les migrants en situation irrégulière y ont donc accès aussi facilement que les autres.
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Accueil gratuit avec ou sans rendez-vous
Le personnel dispose d’un service de traduction téléphonique, ce qui lui permet de recevoir des étrangers ne maitrisant pas le français.
« Les gens peuvent prendre rendez-vous par mail (en français et en langue étrangère) ou sur Doctolib, ou bien venir ici sans rendez-vous », indique encore le Dr Florence.
Sur place, une équipe pluridisciplinaire constituée entre autres d’un dermatologue, d’un gynécologue, d’un psychologue-sexologue, d’infirmiers, d’une conseillère conjugale et d’une assistante sociale, propose donc des consultations de dépistage des IST, ainsi que des traitements pour éviter certaines infections (traitement par Prep contre le VIH) et des consultations spécialisées (parfois payantes).
L’hépatite B sous surveillance
Parmi les infections traitées figurent la syphilis, les hépatites B et C et le VIH.
« Le nombre de cas d’hépatites B est plus important en Afrique subsaharienne et en Asie du Sud-Est », explique le Dr Delphine Mattei, qui effectue les consultations du jour. Aussi les migrants qui viennent de ces régions sont plus particulièrement exposés.
Une prise de sang permet de savoir si le patient a eu la maladie et en a guéri, ou s’il est malade chronique, afin qu’il puisse être suivi ou simplement surveillé si la maladie est en sommeil. « En revanche, comme c’est une maladie sexuellement transmissible, il ne faudra pas hésiter à proposer de vacciner le partenaire [il existe un vaccin contre l’hépatite B] », précise le Dr Mattei.
Des autotests pour détecter le VIH
Chez les personnes originaires d’Afrique subsaharienne, le VIH est une autre IST plus fréquemment détectée. Une infection que la plupart des migrants contractent une fois arrivés en France, après des rapports sexuels non protégés d’après les données de Santé publique France.
Effectuée au sein du centre, une prise de sang classique ou un test rapide permet de déceler la présence du virus. « Nous disposons aussi d’autotests de dépistage [à partir d’une goutte de sang], que la personne peut emporter avec elle pour proposer à son partenaire ou à des proches de le faire de chez eux », ajoute le Dr Florence.
L’an dernier, quelque 37 cas de VIH ont été découverts au centre de sante sexuel, dont plus d’un quart ont été révélés chez des futures mamans, lors d’un test effectué à l’occasion d’une consultation pour suivi de grossesse.
En effet, les locaux de la structure jouxtent ceux d’un centre de protection maternelle (CPM Cité), où est réalisé le suivi médical, psychologique et social de femmes enceintes en situation de grande précarité, dont de nombreuses femmes migrantes à la rue.
Ces dernières ont plus de risques d’être contaminées par le virus du sida en France. Leur extrême précarité les rend vulnérables aux violences sexuelles subies sur le territoire français, ce qui multiplie par quatre leur risque d’infection par le VIH, selon un rapport de l’Agence nationale de recherche sur le sida et les hépatites virales (ANRS) publié en 2018.
Le personnel du centre de santé sexuelle est aussi formé pour détecter ces violences et propose une consultation psychologique en cas de besoin.
Le VIH reste tabou chez les migrants africains
Dans certains cas, quand les futurs pères accompagnent les femmes enceintes, ils acceptent aussi de se faire tester, racontent les soignants, qui regrettent que ça ne soit pas plus fréquent. « Le VIH est encore tabou chez certaines personnes, notamment en Afrique. Les gens ont peur d’être stigmatisés et rejetés dans leur famille, alors ils ne se dépistent pas », déplore le Dr Florence.
« Aujourd’hui il y a beaucoup de personnes qui vivent bien avec ce virus sans le transmettre à leur partenaire grâce au traitement médical », explique la professionnelle de santé. « Si au contraire, ils ne se font pas dépister, cela peut s’aggraver et ils risquent de le transmettre à d’autres personnes [par voie sexuelle] ».
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« Ça n’a rien de honteux d’attraper une maladie sexuellement transmissible quand on a une vie amoureuse active », poursuit le Dr Florence. « Le plus important c’est de porter un préservatif avec le nouveau partenaire du début à la fin du rapport sexuel et de faire des tests régulièrement quand il y a changement de partenaire ».
D’autres IST, moins connues, sont elles aussi détectées et suivies au centre de santé sexuelle, au rang desquelles on trouve la chlamydia et le gonocoque, en tête des infections traitées.
Elles ne manifestent pas toujours de symptômes, parfois des gênes urinaires (brûlures), ou des pertes jaunes inhabituelles chez les femmes. Ces deux IST sont toutefois à prendre au sérieux car elles peuvent entrainer la stérilité chez la femme et des infections du testicule chez l’homme. Elles sont détectées par des prélèvements dans les urines, le vagin, ou parfois la gorge et l’anus en fonction des pratiques sexuelles.
Centre de Santé sexuelle
Téléphone : 0142348300 / Mail : css.paris.htd@aphp.fr
Horaires : de 9h à 19h du lundi au vendredi, sauf le mardi (ouverture de 13h30 à 19h30), avec ou sans rendez-vous
Adresse : Hôtel Dieu, 1 place du Parvis Notre-Dame (6e étage – galerie A1), Paris. Métro : Cité (ligne 4) / Hôtel de Ville (lignes 1et 11) / Châtelet (lignes 1, 4, 7 et 14).