L’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (Anafé) dénonce une situation qui « ne cesse de se dégrader » dans la zone d’attente de l’aéroport de Roissy Charles-de-Gaulle. La structure, occupée par des migrants qui n’ont pas été autorisés à entrer en France, est notamment infestée de punaises de lit, des petits insectes qui se nourrissent principalement de sang humain et provoquent d’intenses démangeaisons.
L’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (Anafé) alerte depuis le mois de février. La Zone d’attente pour les personnes en instance (ZAPI) de l’aéroport de Roissy, en région parisienne, est infestée par les punaises de lit.
Et « la situation ne cesse de se dégrader », selon un communiqué publié mercredi 26 juillet par l’organisation, qui intervient dans ce lieu où sont enfermées des personnes qui n’ont pas été autorisées à entrer sur le territoire. Jeudi, 66 étrangers dont quatre enfants se trouvaient dans la ZAPI de Roissy, selon l’association.
Un protocole a bien été mis en place en octobre 2022, précise à l’AFP le ministère de l’Intérieur. Il comprend un traitement à la vapeur sèche « réputé très efficace » et la création d’une buanderie en avril dernier. Mais l’Anafé assure que « ces moyens se sont révélés inefficaces », et regrette que « les autorités [n’aient] pas fait évoluer ce maigre protocole ».
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Le ministère se défend et signale que « tous les experts précisent qu’aucune solution n’est efficace à 100% ». « À ce jour, aucune chambre n’est fermée pour un problème de punaise de lit », insiste l’État.
Mais la directrice de l’Anafé, Laure Palun, réclame « une modification du protocole », jugé inefficace en raison du taux d’occupation élevé des chambres (jusqu’à 120 personnes au cours des dernières semaines, selon l’association, pour 153 lits d’après l’Intérieur). « S’il y a une infestation de nuisibles dans un lieu d’enfermement, il appartient à l’administration de le fermer le temps que le problème soit éradiqué », a-t-elle déclaré à l’AFP.
Des retenus contraints de dormir dans le couloir
« En sept jours, Omar a dû changer cinq fois de chambre en raison de l’infestation par les punaises de lit », alerte l’Anafé sur Twitter.
L’avocate Sonia Boundaoui a raconté avoir rencontré le 22 juillet trois ressortissants marocains maintenus dans cette zone, « maculés de piqûres ». « Ils m’ont expliqué que ça faisait trois fois qu’ils changeaient de chambre, qu’ils ne dormaient plus et qu’ils avaient été contraints de dormir dans le couloir ».
Lors d’une audience pour statuer sur la prolongation de leur maintien en ZAPI, le juge des libertés et de la détention a reconnu une « exposition particulièrement désagréable » aux punaises de lit, mais dont les conséquences ne constituaient pas « une atteinte au droit à la vie et à la santé » ni « un traitement inhumain et dégradant », selon la décision.
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Pendant ses permanences à Roissy, l’Anafé affirme pourtant avoir rencontré des personnes piquées présentant « une grande fatigue nerveuse : impossibilité de dormir, peur d’être piquées et démangeaisons constantes ». L’infestation par les punaises de lit, petits insectes qui se nourrissent principalement de sang humain, peut entraîner différentes conséquences psychologiques voire psychiatriques (troubles du sommeil, anxiété, sentiment de panique), note un rapport de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) publié mi-juillet.
L’Anafé suspend « ses missions d’intervention »
D’habitude présente aux côtés de la Croix-Rouge, l’Anafé se dit « contrainte de suspendre ses missions d’intervention », en l’occurrence son accompagnement juridique en présentiel, mais conserve sa permanence téléphonique.
Les lieux d’enfermement pour les étrangers, qui comprennent notamment les ZAPI et les centres de rétention administrative (CRA), sont régulièrement pointés du doigt par les associations. Elles dénoncent, depuis des années, des conditions de vie inhumaines dans ces structures qui ressemblent, selon les humanitaires, à des prisons. Les barbelés, les verrous aux portes, la surveillance policière rappellent l’univers carcéral. Des tentatives de suicide, des grèves de la faim y sont régulièrement recensées.
Dans ces centres, des enfants peuvent aussi y être maintenus, au mépris du droit international. La France a été condamnée à 11 reprises ces 11 dernières années par la Cour européenne des droits de l’Homme pour la rétention de mineurs. Depuis la première condamnation de la France en 2012 pour traitement inhumain et dégradant, plus de 35 000 enfants ont été enfermés en CRA, selon l’association la Cimade, présente dans plusieurs structures de ce type.
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