« Le molosse n’abandonnera jamais sa façon éhontée de s’asseoir » dixit l’ivoirien Ahmadou Kourouma dans son célèbre ouvrage ‘’Les Soleils des Indépendances’’. Les pratiques que les guinéens ont connu par le passé sous le CNDD sont malheureusement en train de refaire surface avec le CNRD. Le peuple de Guinée n’est pas encore sorti de l’ornière car, la voie que suit le CNRD est similaire à celle suivie par le CNDD en 2009. C’est justement cette dérive qui a engendré les massacres au stade du 28 septembre, dont le procès en cours a permis d’étaler au grand jour les déboires d’une junte enivrée par le pouvoir. On a l’impression que c’est seulement les musiciens qui ont changé sinon, on danse toujours au même rythme.
Les parvenus du pouvoir qui tournaient autour du CNDD ont brillé par leur incompétence et leur insouciance pour le devenir du pays. L’arrogance et la désinvolture qui les caractérisaient trouvent aujourd’hui leur répondant chez les acolytes des arcanes du CNRD. On se souvient des agissements de Moussa Keita, de Chérif et Cie auprès du capitaine Moussa Dadis Camara pour le mettre sur la mauvaise route. On se souvient également de la floraison des mouvements de soutien à Moussa Dadis tels que : Dadis doit rester, Dadis ou la mort etc. On pensait être sorti de cette démagogie à allure d’escroquerie pour les uns et de naïveté pour les autres.
Le colonel Mamadi Doumbouya avait réagi aux tentatives de quelque soutien que ce soit. Un décret a été même pris par lui interdisant tout mouvement de soutien pourtant consacré par la charte de la transition. Paradoxalement c’est encore pour le colonel Mamadi Doumbouya que s’est constitué un mouvement de soutien à Kankan. On assiste à un mutisme hermétique du CNRD par rapport à cette manifestation de soutien dans le Nabaya. Dadis aussi avait tenté un pareil mouvement à N’Zérékoré considéré alors comme étant un fief qui lui était favorable, si aujourd’hui colonel Mamadi Doumbouya en fait autant dans la ville qui l’a vu naître, la similitude est alors parfaite.
Tout cela prouve à suffisance le dessein caché du colonel Mamadi Doumbouya à s’éterniser au pouvoir. Ceux qui sont en train de le pousser dans cette aventure ne l’aime pas. On juge un homme sur ce qu’il dit et ce qu’il fait. Si ce qu’il dit ne corrobore pas avec ce qu’il fait, on le juge alors par ce qu’il fait. « Il n’y aura pas de chasse aux sorcières, personne ne doit plus mourir pour des raisons politiques, pas de recyclage » voilà la promesse du colonel putschiste au lendemain de sa prise de pouvoir. Rien de tout cela n’a été respecté, des mots rien que des mots. Les anciennes pratiques pour lesquelles il a justifié son putsch sont devenues sa panacée. La justice censée être sa boussole s’est détraquée on assiste quotidiennement aux arrestations arbitraires et à des séquestrations injustifiées.
Les vieilles femmes qui ont manifesté au compte du RPG ont été molestées et mises au gnouf. Les jeunes qui manifestent pour le colonel Mamadi Doumbouya, sont quant à eux autorisés et jamais inquiétés, où est la justice ? le CNRD est en train de modifier tout en sa faveur, quand il préconise la nomination des chefs de quartiers par les gouverneurs. Pourtant à la prise du pouvoir, il avait dit que les élections seraient organisées depuis les quartiers jusqu’à la présidentielle, c’est dommage que cela ne soit plus d’actualité. L’une des valeurs de l’homme dans les sociétés africaines est le respect de la parole donnée. Un homme qui ne le fait pas ne doit pas mériter confiance. Aujourd’hui les observateurs de la vie sociopolitique guinéenne sont abasourdis par la conduite de cette transition. Tous les signaux qu’elle dégage indiquent absolument la confiscation du pouvoir par la junte. On est dans une véritable navigation à vue, aucune lueur ne s’aperçoit à l’horizon, le navire guinéen tangue aux flots de la volonté du colonel Mamadi Doumbouya et de son CNRD.
On ne cessera jamais de dire que le cas Dadis Camara doit servir de leçon au CNRD. Où sont les Moussa Keita, Idrissa Cherif et consorts, eux qui fulminaient de rage et d’engagement auprès du capitaine Moussa Dadis Camara ? Aujourd’hui il est le seul présumé coupable de ces atrocités, ceux qui le flattaient et l’excitaient l’ont fui, pour l’abandonner à son sort. Il est intelligent de tirer les leçons du passé pour éviter de connaitre les mêmes déboires que le CNDD.
Entre CNDD et CNRD la différence est D.
MAM CAMPBELL ÉDITORIALISTE JOURNALISTE INDÉPENDANT ET ACTIVISTE CONSULTANT EN COMMUNICATION