Ça tue trop dans ce bled. Chaque instant, des vies sont arrachées, des familles endeuillées et le nombre d’orphelin augmente. Chez nous, en Guinée, la route tue, l’État décime, les mines absorbent plus que tout autre facteur de mortalité. Chaque semaine qui finit ou qui s’annonce, arrive avec son lot de drames, de douleurs, de malheurs avec son cortège de larmes et sa sirène de pleures et de tristesses. On vit, tous, avec la peur de mourir. Soit par une balle ou par un accident.
Il y a plus de drames anonymes ou passés sous silence dans nos mines de tombeaux et sur nos routes meurtrières que ceux qui connaissent une surmédiatisation. A Siguiri, Mandiana, Kankan, Labé, Mamou, N’Zérékoré, Dinguiraye et partout d’ailleurs, l’actualité reste dominée par les éboulements, les accidents de la route, les attaques à main armée ou de suicides.
Le sang coule, les larmes aussi mais l’indifférence ou le manque de compassions vraies tue plus. Le semblant a dévasté notre humanisme. L’hypocrisie a pris le dessus. Pourquoi même se plaindre, se ronger le coeur et se brûler la tête quand on vit dans un État meurtrier? Pour finir comme un dindon de la farce alors que personne ne se plaint, plutôt se plaît dedans?
Les familles de victimes sous Sékou Touré n’ont jusque-là pas encore fini de porter leur deuil. Car, ne sachant toujours pas si les leurs ont péri au sinistre camp Boiro et les lieux de leur enfouissement dans des charniers restent encore mystérieux.
Les victimes de Lansana Conté se remettent à la volonté de Dieu, en attendant le jugement dernier pour connaître les motifs réels des drames et humiliations subis.
Sous Alpha Condé, plus de 400 personnes ont été sauvagement tuées. Leurs familles vivent toujours sous ce choc et attendent de connaître toute la lumière.
Le pouvoir actuel fait pire que ses prédécesseurs. Plus de 30 morts. C’est le plus grand record de barbarie sur une période courte d’exercice du pouvoir.
L’espoir d’une fin de la sauvagerie d’Etat s’est estompé avec le procès bâclé des événements douloureux du 28 septembre 2009. Rien ne garantit la fin de la criminalité étatique et des impunités à cette allure du procès et pourtant, qui devait sonner le tocsin. Malheureusement, le Guinéen, résigné qu’il est, s’adapte et accepte tout. Et il est même capable, demain, de résister au châtiment des 7 feux de l’enfer. Le Guinéen, c’est cette créature exceptionnelle.
Mais, on a tous ce brin d’espoir en nous. La fin de cette terrible nuit des effroyables et de la froideur. Nul besoin de rappeler qu’un bon citoyen se nourrit d’espoir et qu’un gouvernement doit être un bon marchand d’espérance.
En attendant, ce jour de toutes les promesses, mourir est une délivrance que de vivre et subir les affres des génies de la médiocrité nullement choisis.
Et ces meurtres en groupe sont un enseignement pour tous. Que tu sois peul ou malinké, forestier ou soussou, musulman ou bien chrétien, Dieu, nous contraint de vivre ensemble et de s’accepter avant tout comme humain, l’espèce la plus sacrée qu’il puisse créer. Ces différents drames montrent que Dieu ne choisit pas en fonction du nom, de l’ethnie, de la religion ou de l’âge. C’est à lui que nous appartenons tous et c’est à lui que nous retournons dans des conditions qu’il a choisies et souhaitées.
Alors pourquoi cette vanité des humains, les dirigeants en premier, sachant bien qu’ils sont mortels?
Rangez vos égos surdimensionnés et cutivez en vous l’humilité, la pitié et le pardon.
Le jour où, l’Etat admettra qu’il est la première cause de mortalité dans notre société, les drames diminueront et la vie humaine recouvrira toute sa sacralité.
En attendant, le deuil continue… pauvre de nous !
Source: lerevelateur224.com
L’édito de Habib Marouane Camara, journaliste-chroniqueur.