La cour d’assises de Paris a condamné le rappeur MHD à 12 ans de prison ce samedi. L’artiste comparaissait avec huit coaccusés pour le meurtre d’un jeune homme en 2018, dans le cadre d’un règlement de comptes entre bandes rivales.
Le rappeur MHD a été condamné ce samedi à 12 ans de prison pour meurtre par la cour d’assises de Paris. L’artiste comparaissait avec huit coaccusés pour avoir tué un jeune homme âgé de 23 ans, dans la nuit du 5 au 6 juillet 2018 à Paris, dans le cadre d’un règlement de comptes entre bandes rivales de la cité des Chaufourniers, surnommée la cité rouge, dont viennent les accusés, et celle, voisine, de la Grange aux Belles, situées dans les Xe et XIXe arrondissements. La victime avait été renversé volontairement par une Mercedes dans le Xe arrondissement de Paris, un véhicule retrouvé incendié dans un parking le lendemain des faits. Le jeune homme avait ensuité été passé à tabac par une dizaine d’hommes et lacéré de coups de couteaux. Il était décédé, gisant dans son sang, quelques dizaines de minutes après le départ de ses agresseurs.
Cinq des coaccusés du rappeur ont également été condamnés à des peines allant de 10 à 18 ans de réclusion criminelle. Trois autres hommes ont été acquittés. Les jurés n’ont pas suivi les réquisitions de l’avocat général qui avait requis 18 ans ans de réclusion criminelle contre l’artiste, de son vrai nom Mohamed Sylla, 13 à 20 ans de prison contre six autres accusés, et deux acquittements. Les avocats de la défense avaient plaidé l’acquittement pour leurs clients. Samedi matin, le rappeur MHD avait clamé une dernière fois son innocence, devant une salle comble, avant que la cour ne se retire pour délibérer.
À l’énoncé du verdict, plusieurs femmes dans le public, des proches des accusés, ont éclaté en sanglots. MHD est pour sa part resté stoïque, avant d’étreindre une femme en pleurs. Il a ensuite été directement conduit au dépôt. Ses avocats n’ont pas souhaité faire de déclaration après le verdict. Les condamnés ont 10 jours pour faire appel.
D’étoile montante de l' »afro-trap » à la case prison
Cette affaire a nettement freiné la carrière de l’artiste, pionnier de l' »afro-trap », mélange de hip-hop et de musiques africaine, révélé en 2015 grâce à une vidéo postée sur YouTube devenue virale, point de départ d’une ascension fulgurante. De livreur de pizza, il devient en quelques mois une star reconnue non seulement en France mais aussi à l’étranger, où il est remarqué par des artistes comme Madonna ou Drake Cette « success story » est mise en suspens par son interpellation et son placement en détention provisoire : il restera incarcéré un an et demi avant d’être libéré sous contrôle judiciaire.
Dans ce dossier, le rappeur, qui malgré son succès continuait de fréquenter la cité des Chaufourniers entre deux tournées, a été mis en cause par plusieurs témoins qui ont affirmé qu’il était sur les lieux du crime, ce qu’il conteste depuis le début. Les enquêteurs ont aussi établi que la Mercedes incendiée lui appartenait et une des vidéos de la scène, prise depuis un appartement, montre un homme de type africain aux cheveux teints en blond, vêtu d’un survêtement Puma. Or, à cette époque, MHD avait les cheveux peroxydés et était ambassadeur de la marque de sportswear.
La loi du silence
Cette affaire s’est illustrée, tout au long de l’enquête puis des trois semaines de procès, par la « loi du silence » à laquelle se sont soumis les accusés, mais aussi de nombreux témoins. Un grand nombre d’entre eux, pourtant convoqués, ne se sont pas présentés à la barre. Une loi du silence dictée par la « peur des représailles », de l’aveu de plusieurs personnes.
Dans leurs plaidoiries jeudi et vendredi, les conseils de la défense avaient pilonné la façon dont ont été menées les investigations, fustigeant un dossier « construit à partir d’une rumeur » et s’appuyant sur des éléments « boiteux » et des témoignages manquant selon eux d’objectivité.
Avec France bleu